Au printemps 2012, Thomas Bizzarri et Alain Rodriguez conçoivent l’identité graphique de la maison d’édition Le Feu Sacré. Pour ce faire, le duo réalise deux caractères : le Feu, un alphabet au dessin géométrique original dont l’usage se limite aux couvertures des ouvrages, et le Thermidor, employé pour les textes courants des éditions.
Suite à la parution des trois premiers ouvrages de la maison, Fabien Thévenot (directeur de publication) envisage de publier un spécimen relatif au Thermidor — c’est-à-dire une démonstration des possibilités offertes par le caractère ainsi qu’une mise en valeur des enjeux formels et techniques qui l’accompagnent. Le studio de graphisme propose dès lors à l’artiste Ève Chabanon d’imaginer comment dépasser la vocation purement formelle d’un spécimen typographique, inversant au passage les rapports conventionnels établis entre leurs professions.
Conçu à partir d’un alphabet préexistant, le Thermidor relève d’un genre de caractère habituellement désigné sous le terme de « revival ». Les enjeux de sa conception induisent des notions de temporalité, d’appropriation et d’actualisation. Devenu sujet, le Thermidor est dès lors prétexte à invitations. Différents auteurs issus des champs de l’art ou du design se prêtent ainsi à l’exercice du Spécimen, permettant au caractère de revêtir des formes diverses en fonction des domaines invoqués. Parfois, certains auteurs franchissent les frontières présupposées de leurs disciplines, permettant des détours tant théoriques, littéraires qu’artistiques.
Le Spécimen n’est donc pas à proprement parler un ouvrage spécialisé sur la typographie ou sur la question de la « reprise », mais bien plutôt un recueil de textes que le lecteur est convié à ouvrir en fonction de ses propres points de curiosité.