Les études de l’habitabilité, qui s’appliquent aux conditions de vie et
aux manières de vivre, sont essentielles dans la recherche spatiale. Le
titre de cet ouvrage collectif, Comment quitter la terre ?, en définit le
spectre mais aussi la portée, bien actuelle à l’heure d’une crise écologique
sans précédent. Pour répondre à cette question, ses auteur·e·s
sont repartis d’écrits consacrés à l’habitabilité spatiale en leur accordant
une extension historique et critique. Car ces recherches disposent
d’une histoire aussi bien technique que culturelle, depuis les premières
études effectuées pour des véhicules spatiaux habités (des fusées V2)
jusqu’à celles, plus récentes, associées à la vie confinée lors de futurs
voyages sur Mars (Mars 500). Cette histoire dispose aussi de ses points
aveugles, à travers son approche globalement techniciste et son imaginaire
utopique ou uchronique. Pour répondre de manière critique à ces
différents écueils, le parti pris adopté par cet écrit est triple : d’une part,
revenir sur les méthodes et les savoirs construits par la recherche spatiale
; d’autre part, rematérialiser l’expérience du spatial en la pensant
à partir des objets qu’elle construit et des images qu’elle produit ; enfin,
reconsidérer l’habitabilité spatiale à partir d’expériences concrètes et
sensibles, reliant le terrestre à l’extraterrestre.
Classé dans un ordre de grandeur croissant, qui conduit du gant de
protection des combinaisons pour astronautes aux planètes habitables
pouvant accueillir la vie, les textes composant cet ouvrage considèrent
l’habitabilité spatiale selon les échelles de différents objets, qui font varier
ses problèmes. Au-delà d’une histoire technique et de compétitions
étatiques, les trois auteur·e·s, chercheur·euse·s en art et en design, s’intéressent
aussi aux représentations de ces objets, habitats ou lieux, et
aux liens qu’ils entretiennent à un imaginaire que la science peut, sous
certaines conditions, partager avec les arts. C’est ainsi qu’à travers ce
catalogue d’inventions et de projets richement documenté se dessine
un pan de l’histoire culturelle du XXe siècle.