Auteur : Ziga Testen
Dans cet article, Ziga Testen, graphiste et universitaire basé à Melbourne, se concentre sur une seule image : un portrait photographique d’une figure historique bien connue, le concepteur et typographe Jan Tschichold. Par là Ziga Testen fouille les ruines d’une histoire du design alors que la confiance dans cette institution et ses méta-récits s’est érodée. Testen questionne ce qui a pu être considéré comme la forme canonique de l’histoire du design graphique, comment et dans quelles perspectives on a écrit à son sujet. En particulier, il s’intéresse à la façon dont cette photographie a été utilisée et quelles histoires en ont été racontées.
nº 24 — Une identité de théâtre : Le Schauspielhaus par Cornel Windlin.
Auteurs : Étienne Hervy et Thierry Chancogne
Conçue par Cornel Windlin (et/avec Gregor Huber), la communication du Schauspielhaus de Zürich
pour les saisons 2009/10 et 2010/11 apparaît simultanément à l’arrêt de la collaboration de designers avec le théâtre : le Grand Prix de la biennale de Brno en 2010, le 1er prix du concours international et une exposition à Chaumont l’année suivante en même temps qu’un Swiss Federal Design Award, une brève apparition dans les revues et sites spécialisés et puis rien. Une fois encore, Cornel Windlin est redevenu rare, laissant un travail qui s’impose dans un silence lourd par son amplitude et sa complétude. Par la masse protéiforme de l’imagerie médiatique qu’il réactive.
Séries d’affiches de saison, affiches de spectacle, programmes annuels et mensuels, livrets dédiés à chaque pièce, invitations, flyers, matériel graphique de la programmation jeune public… tout est là, composé dans une graisse tunée spécifiquement de l’Unica77 numérisé avec l’équipe originelle de ses concepteurs par la fonderie Lineto (Windlin aussi), tout fait bloc dans cet aveuglement propre aux jours d’éclipse où se détache le disque noir choisi comme identifiant par Windlin pour le Schauspielhaus. Dix années plus tard, il s’agira d’en proposer une réception méticuleusement ordonnée, renseignée par Cornel Widlin et mise en perspective cavalière par l’analyse de Thierry Chancogne.
nº 25 — La photographie à l’Exposition, Jonathan Monk.
Auteur : Remi Parcollet
Les photographies d’œuvres en situation d’exposition ou d’atelier élargis à la taille du mur deviennent une composante essentielle et de plus en plus systématique de la muséographie contemporaine. Le conservateur institutionnel accompagné de son scénographe, tout comme le curateur indépendant, l’exploitent autant pour re-contextualiser les œuvres que pour les qualités esthétiques d’une image documentaire devenue immersive et réflexive.
Le rapport, évidemment plus riche, des artistes à ces images singulières, révèle, de différentes manières, les enjeux actuels de l’acte d’exposer.
Pour construire une forme de rétrospective de son travail Jonathan Monk a ainsi débuté en 2016 une série d’expositions intitulée Exhibit Model, consistant à recouvrir les murs de l’espace d’exposition par des photographies d’archives documentant ses propres œuvres des vingt dernières années dans différents contextes. Marie J. Jean conçoit ces vues d’exposition mises en espace comme réalité augmentée : « Cette manière de reconsidérer l’exposition, c’est-à-dire d’exposer l’œuvre avec son contexte d’apparition, nous rappelle que l’œuvre d’art ‹ est un lieu ›, ‹ institue un lieu ›, est ‹ un avoir lieu ›. »
Mais pour Jonathan Monk, qui utilise souvent les œuvres d’autres artistes, n’est-ce pas simplement une manière de s’approprier son propre travail ?
nº 26 — Une technique d’impression : l’impression à la demande.
Auteure : Manon Bruet
En 2008, le graphiste anglais James Goggin mène un workshop de deux jours avec les étudiant·e·s en design à la Hochschule Darmstadt, en Allemagne. L’objet qui en résulte prend tour à tour les allures d’un album photos, d’un spécimen typographique et d’un nuancier. Sur la couverture, la phrase « Dear Lulu, Please try and print these line, colour, pattern, format, texture and typography tests for us » constitue une adresse claire à la plateforme d’impression en ligne que ce livre se propose d’éprouver.
Dix ans plus tard, l’offre s’est diversifiée et le succès de telles plateformes est indéniable – le phénomène s’est d’ailleurs étendu bien au-delà du champ de l’édition. Alors que certains déplorent une concurrence déloyale faite aux imprimeurs, d’autres, professionnels ou amateurs, y voient une liberté inouïe de pouvoir imprimer et diffuser à faible coût des objets plutôt bien finis.
Au sein de ces systèmes de production, les possibilités sont multiples mais restent limitées, et cela pose évidemment la question de la standardisation possible des formes et des formats. Néanmoins, avec le Print On Demand, il semble que l’enjeu ne réside plus tellement dans la matérialité d’un objet (le choix d’un format, d’un papier ou d’un façonnage particulier) mais plutôt dans l’existence même de cet objet, en dehors des circuits de production et de diffusion habituels.