es numéros 13 à 15 de la revue critique consacrée au graphisme prennent pour sujet un essai du graphiste Peter Bil’ak sur l’exposition du design graphique, les affiches de M/M (Paris) pour le compte du CDDB-Théâtre de Lorient et la collaboration entre le studio Spassky Fischer et le MUCEM.
N° 13 : Une proposition curatoriale : « Graphic Design in the White Cube » par Peter Bil’ak. Auteure : Lise Brosseau.
En 2006, à l’occasion de la 22e Biennale de Brno, Peter Bil’ak proposait à vingt designers graphiques et collectifs de concevoir les affiches de l’exposition à laquelle ils devaient participer : « Graphic Design in the White Cube ». Ces affiches pourraient alors fonctionner sur deux niveaux : en tant que contenu de l’exposition (la collection nouvellement créée serait présentée accompagnée des esquisses ayant conduit à la réalisation des différentes affiches) et dans les rues de la ville où des exemplaires seraient affichés afin d’informer et de promouvoir l’événement. Par cette invitation, le designer/commissaire souhaitait répondre au constat selon lequel l’espace d’exposition isolerait les productions de design graphique du monde réel, du contexte (commercial, culturel, historique) et de la fonction nécessaires à leur lecture et leur compréhension. Il choisit ainsi de faire des conditions de l’espace d’exposition (en l’occurrence la Moravian Gallery) le contexte des productions, d’exposer le travail du designer graphique plutôt que des objets.
Cette stratégie qui ne masquait pas sa nature auto-référentielle, était accompagnée d’un essai, rédigé par Bil’ak lui-même ; un texte encore régulièrement cité aujourd’hui quand il s’agit d’aborder l’exposition de design graphique comme un sujet. Notre étude engagera l’analyse de ce dernier afin d’interroger l’approche théorique caractéristique de ce projet. Elle tentera de replacer la démarche réflexive, discursive et la part rédactionnelle de cette proposition curatoriale dans l’histoire récente du design graphique. Puis tâchera de démontrer comment ces partis pris conduisent à une forme de redéfinition du design graphique.
N° 14 : Une série d’affiches : CDDB Théâtre de Lorient par M/M (Paris). Auteur : Étienne Hervy.
L’affiche, et particulièrement l’affiche de spectacle, est constitutrice de l’identité française du graphisme, de sa façon de s’organiser, de se présenter et de se déclarer. Pour autant, il existe peu de matériau critique à son endroit quand bien même il serait question d’un travail sur une longue durée (plus de quinze ans, dès les premières années d’activité de M/M (Paris)) et produit par l’un des studios majeurs du graphisme dont la reconnaissance est établie à l’échelle internationale. Les affiches de M/M (Paris) pour le CDDB de Lorient sont remarquables à plus d’un point. La durée de ce travail donc, mais aussi la constance de ses principes (un texte noir et blanc en relation avec une photographie reproduite en quadrichromie), la force de la relation entre les graphistes et leur commanditaire (Eric Vigner). Si cela n’était pas suffisant, il faudra avancer la dimension critique de ces affiches, vis-à-vis du théâtre tout autant que du graphisme et souligner également leur singularité, et leur caractère novateur en rupture directe avec les habitudes de l’affiche culturelle française.
On pourrait encore avancer la nécessité de reprendre un à un les points d’objections provoqués par ce travail mais l’on préfèrera le regarder comme un journal inédit de M/M (Paris) sur eux-mêmes, leur travail et le monde. Mais ce n’est pas comme les surfeurs qui revendiquent une culture « surf ». On n’essaie pas de revendiquer une culture du graphisme. (M/M (Paris)) Travail de commande, partie intégrante du projet du CDDB, ces affiches sont intimement liées au parcours de M/M (Paris) dont elles renferment de nombreux fragments : voyages et lieux fréquentés, étapes dans leur trajet, traces d’autres projets (catalogues de Yohji Yamamoto, collaboration avec Björk qui, photographiée dans le making of de la pochette de son album Vespertine devient, avec la photographe Inez van Lamsweerde, la protagoniste du Savannah Bay de Duras. Il conviendra donc de suivre le fil de ces indices et d’en proposer une lecture.
N° 15 : Un travail quotidien : le Mucem. Auteurs : Manon Bruet et Thomas Petitjean.
Si beaucoup de designers graphiques écrivent sur leurs projets ou leur pratique, il semble que ce soit souvent a priori, dans le cas d’une note d’intention d’appel d’offre par exemple, ou a posteriori, pour commenter leur production. On pense et on fait d’abord, on formule ensuite pour donner à voir à d’autres, on explique, on justifie. C’est finalement un des enjeux de notre métier. De fait, l’accent est la plupart du temps mis sur un contexte, un discours, ou un résultat. Finalement, on parle assez rarement du « pendant », de ce moment du « faire », probablement parce qu’il est plus constitué de discussions – parfois même de négociations – et d’échanges de mails que de design à proprement parler. C’est cela qui nous intéresse ici.
Ce numéro, à plusieurs voix, est construit en deux temps. D’abord, nous aborderons notre travail « d’atelier » au sein du studio Spassky Fischer pour la communication et l’identité du Mucem de Marseille (Musée des civilisations de l’Europe et de la Méditerranée). Plus que d’en expliciter la démarche ou les choix graphiques, il s’agit pour nous de poser un regard, sciemment sans recul, sur un projet que nous menons au quotidien. Parler de son ambition, de son évolution au contact des différents acteurs du musée, de notre place de designer face à une institution culturelle comme celle-ci.
Dans un second temps, nous questionnerons d’autres praticiens sur leur expérience dans des contextes similaires : Mirko Borsche, Studio Dumbar, Okrm, Strobo entre autres. L’occasion par-là de porter un regard plus large sur le quotidien de la discipline.
Faire – Regarder le graphisme est une revue critique bimensuelle consacrée au design graphique, qui paraît en librairie tous les deux mois sous la forme de recueils de trois ou quatre numéros. Editée par Empire, la maison d’édition du studio Syndicat, elle parait d’octobre à juin et s’adresse aussi bien aux étudiants qu’aux chercheurs et aux professionnels, en documentant les pratiques contemporaines et internationales du graphisme ainsi que l’histoire et la grammaire des styles. Chaque numéro propose un sujet unique et tentaculaire, traité par un auteur reconnu.
« Les revues critiques dédiées à l’analyse du design graphique sont malheureusement trop peu nombreuses aujourd’hui, particulièrement en France mais aussi en Europe. Engagés dans une posture analytique et critique des formes et activités du graphisme, Sacha Léopold et François Havegeer souhaitent mener une revue imprimée sur ces pratiques, en agissant avec sept auteurs (Lise Brosseau, Manon Bruet, Thierry Chancogne, Céline Chazalviel, Jérôme Dupeyrat, Catherine Guiral et Étienne Hervy). Ce choix restreint, lié à la volonté de proposer une expérience au sein d’un groupe ayant déjà mené des projets communs, permettra d’inclure des auteurs internationaux la deuxième année. »
édition bilingue (français / anglais)
20 x 29 cm (broché, sous film) + affiche
16 + 28 + 40 pages (ill. coul. et n&b)