Les numéros 5 à 8 de la revue de design graphique. Le recueil regroupe des études sur les sujets suivants : un post Instagram du studio Experimental Jetset pour le centre culturel amstellodamois Paradiso ; une suite de gestes, de Harun Farocki à L’Architecture Aujourd’hui ; l’ouvrage Parallel Encyclopedia de Batia Suter ; la résidence de Charles Mazé & Coline Sunier à la Villa Médicis.
N° 05 : Un post Instagram : P/Pa/Para/Paradiso par jetset_experimental (1 Juillet 2017). Auteure : Manon Bruet.
Le 1er juillet 2017, alors que je m’apprête à commencer des recherches sur l’usage des réseaux sociaux par les designers graphiques, le studio néerlandais Experimental Jetset poste sur Instagram un diaporama de 7 images. Titré « P/Pa/Para/Paradiso », celui-ci présente, dans son ensemble et en détails, l’affichage de leurs nouveaux posters pour le centre de musique et de culture amstellodamois Paradiso. Outre la filiation formelle évidente avec le poster Blow up qu’ils réalisent en 2007 pour le Design Museum de Londres, ce diaporama ne donne que peu de clés de lecture pour ce qui semble être une nouvelle facette de la communication de ce lieu, à laquelle Experimental Jetset travaille depuis 1996.
Avec aujourd’hui plus de 1500 likes et des dizaines de commentaires, ce post constitue le point de départ de mon article. L’occasion d’enquêter donc, de revenir sur cette collaboration qui a pris durant plus de 20 ans diverses formes (flyers, programmes, posters), et ainsi sur la pratique singulière et radicale d’Experimental Jetset. Mais l’occasion aussi de porter un regard plus théorique sur la manière dont est montré et regardé le graphisme sur les différentes plateformes, qui font aujourd’hui partie intégrante de l’enseignement et de l’évolution de la discipline.
N° 06 : Une suite de gestes : Invisible Touch. De Farocki à L’Architecture Aujourd’hui, quelques notes sur le manuel des choses. Auteure : Catherine Guiral.
N° 07 : Un livre : Parallel Encyclopedia, Batia Suter. Auteur : Jérôme Dupeyrat.
Depuis la fin des années 1990, Batia Suter collectionne des livres — de seconde main pour la plupart — qu’elle acquière en raison de leur iconographie, de sorte à constituer une banque d’images qui est localisée dans les rayons de sa bibliothèque. L’ensemble est devenu le matériau de base d’une œuvre qui consiste à présenter ces images selon une logique de montage visuel, en leur attribuant de nouvelles modalités d’apparition et donc de nouvelles possibilités d’interprétation.
Parallel Encyclopedia est à ce jour le travail le plus conséquent de l’artiste. Mené depuis 2004, il a pris la forme de plusieurs installations et de deux ouvrages imposants édités par Roma publications en 2007 et en 2016. Chaque version du projet se caractérise par l’association de centaines d’images hétéroclites (historiques, artistiques, scientifiques, techniques) regroupées en fonction de liens typologiques et formels. D’un dispositif à l’autre, les modalités de présentation de ces images extraites de livres se renouvèlent : séquençage et sérialité des pages reliées ; constellations ou, au contraire, séquences linéaires d’images reproduites et exposées aux cimaises ; constellations ou séquences linéaires de pages de livres ouverts et déposés sur des supports plans. Bien que les images exposées soient les mêmes, ces diverses possibilités d’exposition en déterminent des lectures différentielles.
Au-delà de la fascination qu’un tel projet peut engendrer, ce texte tentera d’en saisir toute la complexité. Pour ce faire, le travail de Batia Suter sera resitué au sein d’une histoire des pratiques iconographiques qui traverse différents champs d’activités et de connaissance. On s’attachera par ailleurs à la trajectoire des images réunies dans Parallel Encyclopedia et aux effets des processus de remédiation auxquels elles sont livrées. Enfin, il s’agira de dessiner une figure de l’artiste en « éditrice » et d’étudier à la fois la fonction du design graphique dans son travail et la place que l’on peut attribuer à ce dernier dans le champ du design graphique, auquel Batia Suter n’appartient pas directement, mais qui traverse ses productions et auquel elle s’est confrontée concrètement dans le cadre de sa collaboration avec le graphiste Roger Willems pour la conception des deux volumes de l’encyclopédie qui, de fait, est aujourd’hui une référence tant pour de nombreux artistes que pour de tout aussi nombreux designers graphiques.
N° 08 : Une résidence : Charles Mazé & Coline Sunier à la Villa Médicis. Auteur : Thierry Chancogne
Relevés typo-topographiques.
Alors qu’elle était encore étudiante à l’Ésad Valence, Coline Sunier avait, avec Grégory Ambos, frappé la première de couverture du livret associé au programme de Zak Kyes, « Forms of inquiry », d’une série de fleurons prélevés dans le patrimoine graphique plus ou moins héraldique des emblèmes très locaux.
Lorsqu’elle fonde son studio avec Charles Mazé, le duo poursuit ce travail de collection qui est à la fois une des étymologies de la lecture et une des caractéristiques de l’esthétique conceptuelle de la liste des années 1970. D’abord dans la refonte de l’identité de l’ésad réalisée en 2012-2013.
Ensuite, dans le travail de résidence à la Villa Médicis Come vanno le cose? consacré aux relevés, sur les murs de Rome de 1512 graffiti dessinant en creux le portrait d’un mystérieux survivant peut-être fantasmé des Brigades Rouges. Enfin dans le travail d’identité développé depuis peu pour le Centre d’art contemporain de Brétigny.
La collection des signes de pouvoir et des traces de résistance profondément inscrits dans les matières toujours politiques des lieux s’accompagne souvent d’un effort de traduction typographique qui rappelle aussi le travail de typisation des écritures personnelles de Fernand Baudin réalisé pour le catalogue du prix éponyme 2012.
#05: An Instagram post: P/Pa/Para/Paradiso by jetset_experimental (July 1 2017). Author: Manon Bruet.
On July 1st, 2017, just as I was about to begin research into the use of social networks by Graphic Designers, the Dutch studio Experimental Jetset posted a slideshow showing their new productions for the Paradiso center for music and culture in Amsterdam on their Instagram account. Seeing the soberly captioned “P/Pa/Para/Paradiso”, I was curious about this post, as it was quite different to the other posts that found their way into my news feed. Though it was very generous in terms of images, it provided very little information or keys to how to read what seemed to be a new aspect of the center’s communications, a project on which Experimental Jetset had been collaborating with them since 1996.
This post, that has since received over 1,500 likes and dozens of comments, is where my article begins.
#06: A series of gestures: Invisible Touch, from Farocki to L’Architecture Aujourd’hui, some notes on the handling of things. Author: Catherine Guiral.
#07: A book: Parallel Encyclopedia, Batia Suter. Author: Jérôme Dupeyrat.
Since the end of the 1990s, Batia Suter has been collecting books—second hand for the most part—that she acquires for their iconography, in such a way as to build up an image database that sits on the shelves of her personal library. All of this has become the basic material for an artwork that consists of presenting the images according to a logic of visual editing, providing them with new modalities of appearance and thus new possibilities of interpretation.
Parallel Encyclopedia is, at the time of writing, the artist’s most significant work. Ongoing since 2004, it has taken the form of a number of installations and two imposing publications from Roma Publications published in 2007 and 2016. Each version of the project is characterized by the association of hundreds of heteroclite images (historical, artistic, scientific, and technical), grouped according to typological and formal links. From one system to another, the conditions of presentation of these images taken from books are renewed: the sequencing and seriality of bound pages; constellations or, on the contrary, linear sequences of images reproduced and exhibited on wall panels; constellations or linear sequences of book pages opened and placed on flat mounts. Though the exhibited images are the same, these various exhibition possibilities determine differential readings.
Beyond the fascination that such a project can generate, this text will attempt to seize all of its complexity. To do this, Batia Suter’s work will be re-situated within the context of a history of iconographic practices that run through different fields of activities and knowledge. We will also focus on the trajectory of the images gathered in Parallel Encyclopedia and the effects of the process of remediation to which they are subjected. Ultimately, it will be a question of drawing a figure of the artist as an “editor” and of studying both the function of Graphic Design in the artist’s work and the place that we can attribute to the artist in the field of Graphic Design, a field to which Batia Suter doesn’t directly belong, but one that runs through her productions, and to which she was confronted in a concrete fashion in the context of her collaboration with the Graphic Designer Roger Willems in the design of the two volumes of the encyclopedia that, in fact, is today a reference for many artists, as much as it is for a large number of Graphic Designers.
#08: A residency: Charles Mazé & Coline Sunier at the Villa Médicis. Author: Thierry Chancogne.
Typo-topographic records.
While still a student in the Ésad Valence, Coline Sunier, along with Grégory Ambos, created a striking front cover for the booklet associated with the Zak Kyes programme, “Forms of Inquiry”, using a series of jewels sampled from the more or less heraldic graphic patrimony of highly local emblems.
When she founded her studio with Charles Mazé, the duo continued the work of collection, which is at the same time one of the etymologies of reading, and one of the characteristics of the conceptual aesthetic of the list that emerged in the 1970s—first, in the re-casting of the Ésad Valence’s identity in 2012-2013; then in the work created during a residency at the Villa Médicis, Come vanno le cose?, dedicated to records of 1,512 graffiti found on the walls of Rome illustrating the portrait of a mysterious survivor, perhaps imagined, of the Red Brigades; and more recently in the identity developed for the Centre d’art contemporain in Brittany.
The collection of signs of power and the traces of resistance profoundly inscribed in the always political matter of the spaces is often accompanied by an attempt at typographic translation bringing to mind the work of typification in the personal writings of Fernand Baudin, created for the catalogue of the eponymous prize in 2012.
Faire – Regarder le graphisme est une revue critique bimensuelle consacrée au design graphique, qui paraît en librairie tous les deux mois sous la forme de recueils de quatre numéros. Editée par Empire, la maison d’édition du studio Syndicat, elle parait d’octobre à juin et s’adresse aussi bien aux étudiants qu’aux chercheurs et aux professionnels, en documentant les pratiques contemporaines et internationales du graphisme ainsi que l’histoire et la grammaire des styles. Chaque numéro propose un sujet unique et tentaculaire, traité par un auteur reconnu.
« Les revues critiques dédiées à l’analyse du design graphique sont malheureusement trop peu nombreuses aujourd’hui, particulièrement en France mais aussi en Europe. Engagés dans une posture analytique et critique des formes et activités du graphisme, Sacha Léopold et François Havegeer souhaitent mener une revue imprimée sur ces pratiques, en agissant avec sept auteurs (Lise Brosseau, Manon Bruet, Thierry Chancogne, Céline Chazalviel, Jérôme Dupeyrat, Catherine Guiral et Étienne Hervy). Ce choix restreint, lié à la volonté de proposer une expérience au sein d’un groupe ayant déjà mené des projets communs, permettra d’inclure des auteurs internationaux la deuxième année. »
Bilingue FR/EN
4 numéros de 20 pages