Botte blonde est un livre de l’artiste John Deneuve. Un album de dessins, mais aussi une chose mentale : un jeu de l’esprit. Jeux de mots et de formes juxtaposés dans des associations libres. Les objets color(i)és sur les pages en jouent ensemble, deux à deux; s’amusent de leur appariement, dialoguent. Des formes simples, faussement enfantines et somme toute assez stylisées, dont on pourrait dire, si ça nous échappait, qu’elles dessinent souvent des formes de « manger » (genre de fruits, glaces, gateaux, frites, bonbons; le tout acidulé et délicieusement acide)…
Et justement, le jeu avec les images et les mots fonctionne sur de tels tac-au-tac, sur de tels réflexes noétiques libérés. Drôle ? oui, ça l’est (ainsi du « dialogue » des mots = Renault 5/roucouler)… Drôle, mais pas seulement : peut‑être parvient-on, là — enfin — à ne plus obéir à la seule logique et à penser par images.
Et si cet album à l’apparente innocence était un manuel de survie mentale, une sorte de recueil de mandalas lumineux, qui nous laisseraient médusés par leur économie, par leurs renvois faits de quelques mots, de rares traits colorés ? Une grammaire sommaire, un jeu doux.
Ajoutons que John Deneuve a aussi produit d’autres albums, mais de musique ceux-là, sous le nom de Sugarcraft (avec Doudou Boy). Il y a, là aussi, des associations possibles avec les paroles de leurs chansons; et l’indice de son goût pour la composition, les mélanges, mixes de couleurs et d’arrangements sonores (cf. les roto-reliefs du clip de Polygonal Egg). Même son art du costume a des échos ici.
À le feuilleter encore une fois, on peut en faire la découverte : cet album de dessin serait donc, finalement, un tapis sonore pour jeux d’images.
DV
92 pages